• [ Un article de Jacques KMIECIAK, paru dans Liberté Hebdo et Liberté 62.


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    Au tribunal de Béthune, ce mardi 6 novembre
    Solidarité avec un militant antifasciste

    Le 17 juin, au soir du second tour de l’élection législative, la police arrêtait
    six militants antifascistes à Hénin-Beaumont. L’un d’eux comparaîtra devant le tribunal correctionnel
    de Béthune ce 6 novembre à partir de 13h30.

    Le 17 juin dernier, des mili-
    tants de l’antifascisme se diri-
    geaient vers l’hôtel de ville d’Hénin-
    Beaumont où devaient être pro-
    clamés les résultats de l’élection
    dans la 11e circonscription du Pas-
    de-Calais. Le 2e tour y opposait Phi-
    lippe Kemel (PS) à Marine Le Pen
    (FN). Ils n’en ont pas eu l’opportu-
    nité. Arrêtés, placés en garde à vue au
    commissariat de Lens, ils n’en sont
    sortis que le lendemain. L’un d’eux,
    Sébastien, est aujourd’hui poursuivi
    pour port d’arme de sixième catégo-
    rie (une matraque télescopique) avec
    « circonstance aggravante » car une
    autre personne du groupe portait un
    couteau. Il s’agit d’un mineur « qui ne
    semble plus être inquiété pour le
    moment », fait remarquer le collectif
    de soutien à Sébastien créé pour la
    circonstance. « Ce soir-là, nous mar-
    chions calmement vers la mairie. Nous
    pensions que Marine Le Pen allait être
    élue. Ils nous semblaient importants
    de marquer le coup », souligne Sébas-
    tien.


    Du sursis ?


    Une façon pour les militants antifas-
    cistes de manifester leur indigna-
    tion. Le groupe défile dans le calme.
    Ni provocation ostentatoire, ni raid
    tapageur... Or « quatre voitures de
    police nous ont empêchés d’atteindre
    notre but ; ce qui me fait dire que leur
    intervention était préméditée », pour-
    suit-t-il.
    Pour son comité de soutien, à travers
    cette inculpation, « l'Etat reproche à
    Sébastien et aux militants antifas-
    cistes d'avoir osé penser pouvoir se
    défendre en cas d'agression de bandes
    néonazies. L'Etat veut faire croire que
    les antifascistes seraient des per-
    sonnes pratiquant une violence gra-
    tuite, qui ne cherchent que le désor-
    dre. La réalité est que depuis des
    semaines, les militants du Front
    National et d'autres groupes radicaux
    multipliaient les agressions et les
    pressions sur des militants de gauche
    en général, et ciblaient plus particu-
    lièrement les activistes antifascistes ».
    Egalement poursuivi pour refus de
    prélèvement génétique (ADN),
    Sébastien, pour ce dernier motif,
    peut être théoriquement sanctionné
    d’un an de prison et de 15.000 euros
    d’amendes.
    Pour le port de la matraque, il risque
    « dix ans de prison et 3.750 euros
    d’amende », selon son avocat, du bar-
    reau de Béthune. « L’infraction étant
    caractérisée », l’avocat plaidera « le
    fait que mon client travaille, n’a pas
    de casier judiciaire et n’est pas un
    délinquant ». Aussi Sébastien risque-
    t-il plus probablement d’écoper
    d’une « peine de prison avec sursis et
    d’une amende ». A moins que la
    mobilisation incite la Justice à plus
    de clémence. Des dérapages lors du
    rassemblement « pourraient avoir
    l’effet contraire. Les juges pourraient
    faire de ce dossier un exemple », craint
    son avocat qui préfère que l’on ne
    cite pas son nom. Ambiance...


    Une valeur symbolique

    Pourtant l’enjeu de ce procès est
    éminemment politique, pour le
    Comité de Vigilance antifasciste 62 à
    l’initiative de la manifestation héni-
    noise de juin. « Le procès de Sébastien
    aura une valeur particulière. En fai-
    sant passer les antifascistes pour des
    fauteurs de troubles, le but de l’Etat
    est de nous isoler du peuple. En cette
    période de crise du capitalisme, les
    fascistes profitent de son désarroi et
    de sa misère pour tenter de détourner
    sa colère : le nationalisme est une
    arme puissante pour empêcher la
    classe ouvrière de se libérer de ses
    chaînes ».


    Jacques KMIECIAK